• Alice et Bella partent pour Volterra

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    (To Volterra, part 2)
    Extrait de Tentation :
     
    Nous attrapâmes notre vol de justesse, puis la vraie torture commença. L'avion patientait sur la tarmac, cependant que les hôtesses arpentaient (d'une démarche bien trop nonchalante à mon goût) les allées et s'assuraient que les sacs rentraient bien dans les compartiments à bagages.
    (...)
    Enfin, l'appareil s'éloigna paresseusement du couloir d'embarquement et prit de la vitesse avec une persistance qui ne fit qu'accroître mon angoisse. Si j'espérais un quelconque soulagement au décollage, j'en fus pour mes frais - mon impatience ne diminua en rien.
    (...)
    Je me rappelai avec une douloureuse clarté les mots qu'il avait prononcés sur le canapé en regardant Roméo et Juliette se tuer l'un après l'autre. "Il était évident que je ne comptais pas vivre sans toi !", avait-il dit comme si c'était une évidence. Hélas, les paroles qu'il m'avait quittée les avait occultés durablement.
    (...)
    - Si j'avais un moyen d'agir sans t'impliquer, Bella, je ne te mettrais pas en danger comme ça. C'est très mal de ma part.
    - Ne dis pas de bêtises. Je devrais être le cadet de tes soucis. Explique-moi plutôt ce que tu entendais à propos de détester mentir à Jasper.
    - Je lui ai juré que je m'en irais avant qu'ils ne me tuent également, marmonna-t-elle avec un pauvre sourire. C'est un serment sur lequel je n'ai aucune garantie.
    Elle souleva un sourcil, comme pour m'inciter à prendre plus au sérieux le danger qu'impliquait notre mission.
    (...)
    Au bout d'une éternité, l'avion commença sa descente sur New York. Alice ne sortit pas de sa transe, et j'hésitai à l'effleurer, tentant le geste un dizaine de fois et y renonçant, jusqu'au moment où l'appareil se posa en nous secouant comme des pruniers.
    - Alice ! murmurai-je enfin. Alice, nous y sommes.
    Je la touchai. Elle ouvrit très lentement les yeux et tourna la tête de droite à gauche.
    - Du neuf ? m'enquis-je à voix basse, consciente de mon voisin indiscret.
    - Pas vraiment, souffla-t-elle, à peine audible. Il se rapproche. Il est en train de s'interroger sur la manière de présenter sa requête.
    Nous dûmes courir pour attraper notre correspondance, ce qui valait mieux que devoir poireauter. Dès que l'appareil eut décollé, Alice referma les yeux et retomba dans sa stupeur.
    (...)
    - Ils lui ont stipulé leur refus.
    Elle s'exprimait tout doucement, et je remarquai que son enthousiasme l'avait désertée.
    - Et ? m'étranglai-je.
    - Au début, ça a été chaotique, je n'ai perçu que des images éparses, ses plans n'arrêtaient pas de changer.
    - Quels plans ?
    - Il y a eu un mauvais moment, quand il a décidé de chasser. Dans la ville, précisa-t-elle en constatant que je n'avais pas compris la nuance. Il a failli le faire, puis il s'est ravisé à la dernière minute.
    (...)
    - Oh, c'est très simple. Il va juste se mettre en plein soleil.
    Très simple en effet. Ca suffirait amplement. Le souvenir d'Edward dans la clairière, resplendissant, ruisselant de lumière comme si sa peau avait été constituée de milliers de diamants, était gravé dans ma mémoire. Nul humain ayant eu le loisir d'assister à ce spectacle n'était près de l'oublier. Les Volturi ne toléreraient pas un tel geste.
    (...)
    - Alors nous arriverons trop tard, murmurai-je, à deux doigts de la panique.
    - Non, objecta-t-elle. En ce moment, il est obsédé par la théâtralité. Il veut le plus vaste public possible. Il a donc choisi la place principale, sous la tour de l'horloge. Les murs sont élevés, à cet endroit. Il attendra que le soleil soit à son zénith.
    - Nous avons donc jusqu'à midi ?
    - S'il s'en tient à ce qu'il a décidé, oui.
    (...)
    Dans un crissement de pneus, une Porsche d'un jaune éclatant s'arrêta à quelques pas de l'endroit où je trépignais. Le mot "TURBO" était inscrit en cursives argentées sur l'arrière du véhicule.
    (...)
    - Tu as vu autre chose ? demandai-je.
    - Il se passe quelque chose. Une espèce de festival. Les rues sont bondées de visiteurs, et des drapeaux rouges ont été accrochés un peu partout. Quel jour sommes-nous ?
    - Le quinze.
    - Quelle ironie ! La Saint-Marcus.
    - C'est-à-dire ?
    - La ville célèbre cette date tous les ans, ricana-t-elle, sardonique. D'après la légende, un missionnaire chrétien, un certain père Marcus - celui des Volturi - a chassé les vampires de Volterra il y a mille cinq cent ans. Ensuite, il serait mort en martyr, en Roumanie où il poursuivait sa traque.
    (...)
    Je commençais à comprendre pourquoi elle trouvait la situation ironique.
    - Ils ne vont pas être très contents qu'Edward leur gâche ce jour, hein ?
    - Non, admit-elle en perdant sa bonne humeur. Et ils sont prompts à la détente.
    (...)
    - Volterra, annonça Alice d'une voix glaciale.
    Quand nous commençâmes l'ascension de la colline, la circulation se densifia. Plus nous montions, plus nombreuses étaient les voitures, trop proches les unes des autres pour qu'Alice puisse continuer à les doubler. Nous ralentîmes, bloquées par une petite Peugeot marron clair. De son côté, la pendule du tableau de bord semblait avoir accéléré son cours.
    - Alice ! m'énervai-je.
    - Il n'y a pas d'autre accès à la ville, tenta-t-elle de m'apaiser.
    (...)
    - On y est presque, m'encouragea Alice.
    J'agrippais la poignée de la portière, prête à me ruer dehors dès qu'elle m'en donnerait l'ordre.
    (...)
    Alice arrêta la Porsche. J'ouvrais déjà ma portière. Elle désigna l'extrémité de la rue qui s'évasait sur une place lumineuse.
    - Là-bas ! Nous sommes au sud de la place. Traverse-la directement et fonce sur la droite du clocher. Moi, je vais trouver un autre chemin...
    (...)
    Je ne m'attardai pas pour la regarder se fondre dans la masse de gens, ne refermai pas ma portière non plus. Ecartant une grosse femme de mon chemin, je détalai à toutes jambes, tête baissée, ne prêtant attention à rien si ce n'est aux pavés inégaux sous mes pieds.
    (...)
    Les corps pressés les uns contre les autres n'offraient aucune trouée où me faufiler. Je me forçai un passage, écartant les mains qui me repoussaient. Des exclamations furibondes me parvinrent aux oreilles, entrecoupées de coups sournois, mais nulle n'était dans un langage qui me fût intelligible.
    (...)
    Malgré le soleil radieux, le vent était glacial, et l'humidité ne fit qu'accentuer l'impression de froid. La fontaine était très large, et elle me permit de dépasser le milieu de la place en à peine quelques secondes. Je ne ralentis pas en parvenant de l'autre côté, me servis du rebord comme d'un tremplin et me jetai de nouveau dans la cohue. Les gens s'écartaient plus volontiers de moi, à présent, de peur d'être éclaboussés par les gouttes gelées qui jaillissaient de mes vêtements trempés. Une fois encore, je jetai un coup d'oeil à l'horloge. Un coup sourd ébranla les lieux, secouant les pavés sous la plante de mes pieds.
    (...)
    Soudain, je l'aperçu et je compris qu'il ne me voyait pas. C'était lui. Nulle hallucination, cette fois, ce qui me permit de constater à quel point les miennes avaient été pauvres et ne lui avaient pas rendu justice.
    Immobile comme une statue, à quelques pas de la place ensoleillée, il avait les paupières fermées, des cernes d'un mauve soutenu, les bras ballants, paumes tendues en avant. Il avait l'air paisible, comme s'il rêvait à des choses agréables. Son torse marmoréen était nu - un petit tas de tissu blanc gisait à ses pieds. La lumière qui se réfléchissait sur les pavés de la place rebondissait doucement sur sa peau.
    (...)
    Au coup suivant, il avança vers la lumière.
    - Non ! m'égosillai-je. Edward ! Regarde-moi !
    Il n'écoutait pas, Un très léger sourire sur les lèvres, il leva le pied pour franchir le pas qui l'exposerait.
    Je le heurtai de plein fouet, si brutalement que j'aurais été projetée à terre si son bras ne m'avait pas retenue et stabilisée. J'en eus la respiration coupée, faillis me déboîter le cou.

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