• Agression à Port Angeles

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    (Humans are predators too)
    Extrait de Fascination :
     
    Ce ne fut qu'au deuxième carrefour que je me rendis compte que je m'égarais. Les rares pietons allaient tous en sens inverse, et la plupart des bâtiments alentour étaient des entrepôts.
    (...)
    Un groupe de quatre hommes surgit soudain de l'artère vers laquelle je me dirigeais, habillés de façon trop décontractée pour rentrer du bureau, trop négligée pour des touristes. Au fur et à mesure qu'ils se rapprochaient, je constatai qu'ils étaient à peine plus âgés que moi. Ils échangeaient des plaisanteries bruyantes, des rires gras, des bourrades viriles. Je me collai le plus possible côté mur afin de leur laisser un maximum de place et accélérai le pas en évitant de les dévisager.
    - Hé, toi ! m'apostropha l'un d'eux en me croisant.
    Il devait s'adresser à moi, vu qu'il n'y avait personne d'autre. L'instinct me poussa à poser les yeux sur lui. Deux gars s'étaient arrêtés, les deux autres ralentissaient. Apparemment, c'était le plus proche, une armoire à glace d'un vingtaine d'années aux cheveux noirs, qui avait parlé.
    (...)
    Le ciel se couvrit brusquement. J'inspectai les nuages menaçants par-dessus mon épaule et m'aperçus, avec effroi, que deux hommes marchaient sans bruit à quelques dix mètres derrière moi. Je reconnus des membres du groupe que j'avais croisé un instant plus tôt, même si aucun n'était le brun qui m'avait adressé la parole. Me détournant aussitôt, je pressai le pas. (...) Je serrais mon sac à main, passé en bandoulière par-dessus ma tête, histoire d'éviter qu'on me l'arrache. Je savais exactement où se trouvait ma bombe anti-agression - dans mes bagages, sous mon lit, encore emballée.
    (...)
    Je tendis l'oreille, guettant le bruit feutré de leur présence, bien trop doux comparé au tapage qu'ils avaient fait précédemment ; ils ne modifiaient par leur allure, ne se rapprochaient pas. Je m'exhortai à respirer, me rassurai - après tout, rien ne me prouvait que je représentais une cible pour eux.
    (...)
    J'envisageai un instant de piquer un sprint. Mais il me sembla que j'avais semé les deux hommes ; par ailleurs, je savais qu'ils n'auraient aucun mal à me rattraper. J'étais à peu près sûre de trébucher et de m'étaler si je tentais d'accélérer. Les bruits de pas s'étant définitivement éloignés, maintenant, je risquai un regard derrière moi. Soulagée, je constatai que mes suiveurs se trouvaient à une dizaine de mètres ; malheureusement, ils avaient les yeux braqués sur moi.
    (...)
    L'artère était bordée de ârt et d'autre par des murs aveugles. J'aperçus, à quelques pâtés d'immeubles de là, des réverbères, des autos, des piétons, mais ils étaient beaucoup trop loin pour moi. Car appuyés nonchalamment contre une façade, à mi-hauteur de la rue, les deux autres membres de la bande m'attendaient. Un sourire excité se dessina sur leurs lèvres lorsque je me figeai sur place. Je compris alors que je n'avais pas été suivie. J'avais été traquée.
    (...)
    - Te voilà donc !
    La voix tonitruante de l'armoire à glace réduisit en miettes le silence de plomb, et je sursautai. Dans la pénombre grandissante, on aurait dit que son regard me traversait sans me voir.
    (...)
    Malheureusement, je ne tardai pas à devoir ralentir. La distance qui me séparait des deux hommes postés dans la rue s'amenuisait trop vite. Je suis capable de pousser des hurlements stridents. J'avalai donc une grande goulée d'air, mais ma gorge était si sèche que je doutai de réussir à obtenir le volume sonore souhaité. D'un mouvement leste, je récupérai mon sac dans une main, serrant la bandoulière fermement, prête à l'abandonner ou à m'en servir comme d'une arme si besoin était.
    (...)
    - Sois pas comme ça, chérie ! rétorqua l'autre tandis que ses camarades s'esclaffaient bruyamment.
    Jambes écartées, je me préparai à l'affrontement, essayant, malgré ma panique, de me rappeler les maigres notions d'autodéfense que je possédais. Tranchant de la main lancé en l'air en espérant réussir à briser le nez ou l'enfoncer dans le cerveau ; doigts plongés en crochet dans les orbites pour énucléer l'agresseur ; et, bien sûr, le classique coup de pied judicieusement placé.
    (...)
    Tout à coup, des phares surgirent. Le véhicule manqua de renverser le gars trapu, qui dut sauter sur le trottoir. Je me précipitai au milieu de la route - soit cette voiture s'arrêtai, soit elle m'écrasai. Elle m'évita d'un brusque coup de volant avant de stopper en dérapant à moins d'un mètre de moi, portière ouverte.
    - Grimpe ! lança une voix furibonde.
    De façon stupéfiante, mon angoisse s'évapora aussitôt ; tout aussi stupéfiant fut le sentiment de sécurité qui me submergea, avant même que je fusse monté dans l'auto, juste parce que je l'avais reconnu. Je sautai sur le siège en claquant la portière.
    (...)
    Edward prit un brusque virage à gauche, accéléra encore, grilla plusieurs stops. Pourtant, je n'avais pas peur du tout et je me fichais éperdument de l'endroit où il m'emmenait. Je l'observai, envahie par un soulagement dont l'intensité n'était pas seulement due à sa venue inopinée et à mon sauvetage. Le temps de retrouver ma respiration, j'étudiai ses traits parfaits et m'aperçus qu'il était dans une colère noire.
    - Ca va ? croassai-je.
    - Non, riposta-t-il, fou de rage.
    (...)
    - Bella ?
    La voix était tendue, contrôlée.
    - Oui ?
    Un couinement de souris. Je me grattai discrètement la gorge.
    - Tu n'as rien ?
    Sa fureur rentrée était palpable.
    - Non.
    - Distrais-moi, s'il te plaît.
    - Pardon ?
    Il poussa un bref soupir, ferma les yeux et se pinça l'arête du nez.
    - Parle-moi, dis n'importe quoi, même des bêtises, jusqu'à ce que je me calme.
    Je me creusai la tête.
    - Demain avant les cours, j'écrase Tyler Crowley.
    (...)
    - Parfois, j'ai du mal à contrôler mes humeurs, Bella. (Lui aussi murmurait. Lorsqu'il regarda par la fenêtre, ses yeux se plissèrent en deux fentes étroites.) Sauf qu'il ne servirait à rien que je retourne là-bas pour régler leur compte à ces... (Sans terminer sa phrase, il baissa la tête, s'efforçant de maîtriser sa colère.) Enfin, poursuivit-il, j'essaie de m'en convaincre.
    (...)
    - Jessica et Angela vont s'inquiéter, marmonnai-je. j'étais censée les retrouver.
    Toujours muet, il mit le contact, effectua un demi-tour en douceur et fonça vers la ville. (...) Il se gara sans effort le long du trottoir, dans un emplacement dont j'aurais pourtant juré qu'il était trop court pour la Volvo. J'aperçus la vitrine illuminée de La Bella Italia, et mes amies qui s'éloignaient d'un pas anxieux.

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